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[Interview] Nicolas Jourdain – Climatologie

Climatologue, chargé de recherches CNRS à l’Institut des géosciences de l’environnement à Grenoble, Université Grenoble Alpes (UGA)

Quel est votre métier ?

Je suis « chargé de recherche », c’est à dire que je suis payé pour faire avancer la connaissance scientifique, et plus particulièrement les connaissances sur le devenir de la calotte glaciaire d’Antarctique. Mon employeur est le CNRS, le Centre National de la Recherche Scientifique, qui regroupe de nombreuses activités de recherche en France en physique, mathématique, chimie, biologie, sciences de l’Univers, du climat, de l’environnement, du numérique, sciences humaines et sociales, etc…

A quoi ressemble votre journée de travail ?

Au cours d’une journée de travail typique, je passe quelques heures à discuter de nos travaux scientifiques avec les doctorant.e.s, post-doctorant.e.s et ingénieurs que j’encadre. Les doctorants sont étudiants ou étudiantes payés pour préparer une thèse pendant environ 3 ans. Les post-doctorants sont des jeunes chercheurs ou chercheuses employés pendant quelques années après la thèse, souvent venant de l’étranger. Les ingénieurs ont des spécialités techniques qui sont indispensables pour l’avancée de nos travaux, par exemple en modélisation numérique.

Une autre partie de ma journée typique est faite de réunions, souvent en visioconférence, pour préparer ou gérer des projets de recherche français ou internationaux. Ces projets servent avant tout à obtenir de l’argent pour développer nos activités de recherche, c’est-à-dire pour employer des doctorants, post-doctorants ou ingénieurs. Ils servent aussi à acheter du matériel voire à financer des expéditions scientifiques.

Une partie de la journée est parfois consacrée à la communication de nos résultats, c’est à dire à la préparation ou participation à des conférences scientifiques entre chercheurs. Je réponds aussi souvent à des sollicitations de journalistes, ou du « grand public » comme c’est le cas ici.

Quand il me reste du temps, je réalise mes propres travaux de recherche en développant des simulations numériques du climat et de la calotte antarctique. J’écris aussi des articles scientifiques (en anglais) quand j’obtiens des résultats qui méritent d’être partagés avec les chercheurs du monde entier.

Exceptionnellement, je passe quelques jours à l’étranger dans des réunions internationales de chercheurs qui visent à échanger sur les dernières avancées scientifiques.

Qu’est-ce qui vous intéresse le plus dans ce métier ?

Je suis intéressé par comprendre petit à petit le fonctionnement des choses compliquées comme l’écoulement des calottes polaires et le lien avec l’évolution du climat. J’aime beaucoup le fait que nous, les chercheurs, sommes en majorité une communauté de passionnés, extrêmement motivés par ce travail de recherche. J’aime aussi énormément le côté très international de ce métier, qui m’amène à côtoyer régulièrement des personnes de tous les continents.

Depuis quand aimez-vous la science ?

Je pense toujours avoir été curieux de comment fonctionnent les choses. Je me souviens de mes premiers cours de physique au collège, en 4ème, où je m’étais réjoui de voir apparaître cette nouvelle matière tellement intéressante avec plein d’expériences. Plus tard, au fur et à mesure de la scolarité et des études, mon goût pour les sciences physiques a été plus ou moins prononcé selon les moments, mais je pense que j’ai toujours aimé la démarche scientifique: se poser des questions, et trouver les moyens d’y répondre.

Quel est votre plus beau souvenir scientifique ?

Je vais en donner deux, assez différents.

Le premier, c’est une expédition en Antarctique, pendant 2 mois, pour mesurer l’accumulation et la fonte de neige, le lien avec le vent et les nuages. C’est un souvenir magnifique du fait de la beauté des animaux et des paysages, et du fait de cette ambiance du bout du monde, confiné dans une petite base scientifique et logistique.

Le second, c’est la participation à un grand groupe de travail international pendant 3 ans, à l’issue duquel nous avons proposé une façon d’estimer la future contribution de l’Antarctique au niveau des mers jusque l’année 2100. Ces résultats ont servi de base au dernier rapport du GIEC (Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat), et ont eu un large écho dans les journaux, radios et télévisions. Ce groupe de travail était constitué de personnes très sympathiques d’origines diverses.

Quel conseil donneriez-vous à des élèves qui veulent devenir scientifiques ?

Je pense qu’il est important de chercher à comprendre les choses qu’on doit apprendre pendant le parcours scolaire et universitaire. On peut s’en sortir assez bien et assez loin en apprenant beaucoup de choses par cœur, mais ça ne fonctionne pas bien pour devenir scientifique.

En ce qui concerne mon domaine de recherche, la science du climat, il est important de ne pas négliger les sciences fondamentales telles que les mathématiques et la physique au cours des études, car ce sont des choses qui servent très souvent et sur lesquelles il est difficile de se remettre à niveau tardivement.