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[Interview] Jérémy Duveau – Paléoanthropologie

Chercheur associé en paléoanthropologie, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)

Quel est votre métier ?

Je suis paléoanthropologue, c’est-à-dire que je suis un paléontologue spécialisé dans l’évolution humaine. Mon travail consiste à étudier les restes fossilisés pour mieux comprendre notre évolution. Plus précisément, je travaille sur les empreintes de pieds fossiles mais aussi les fossiles d’os de cuisses, de jambes ou de pieds.

Je travaille actuellement dans le laboratoire de paléoanthropologie de l’Université de Tübingen en Allemagne, laboratoire international où je côtoie des chercheurs de différentes nationalités. Je suis également rattaché au Muséum national d’Histoire naturelle de Paris où j’ai passé ma thèse de doctorat.  

A quoi ressemble votre journée de travail ?

Je n’ai pas de journée type à proprement parler, cela dépend des périodes, des découvertes qui peuvent être faites ou de l’enseignement universitaire auquel je participe. Certaines semaines peuvent être bien plus denses que d’autres en termes de temps de travail. De façon simplifiée, mon travail se divise en deux grandes parties : les études directement sur le terrain et celles en laboratoire.

Sur le terrain, je peux participer à des fouilles au cours desquelles des découvertes peuvent être réalisées. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, les fouilles ne représentent qu’une faible partie du travail d’un paléontologue, la plupart du travail se fait en laboratoire.

En laboratoire, je peux réaliser plusieurs types de tâches

  • La recherche et la lecture d’articles scientifiques récemment publiés afin d’être informé des nouvelles découvertes ou études dans mon domaine
  • L’étude de fossiles, récemment découverts ou non. Cette phase représente la majorité de mon temps de travail. Les études des fossiles répondent à plusieurs objectifs : modélisation des fossiles en 3 dimensions, descriptions anatomiques et statistiques (à partir de mesures), estimation biologique à partir de ces descriptions (quel âge l’individu avait à sa mort ? Quelle était sa masse ? Sa taille ?), modélisation de sa locomotion (Comment chaque individu marchait ?)
  • La publication d’articles (souvent en anglais) dans des revues scientifiques. Cette phase de publications peut prendre plusieurs mois voire quelques années. Elle se divise en plusieurs étapes : la réalisation d’une première version avec l’aide de collègues ayant également participé à l’étude, la proposition de l’article à une grande revue scientifique, l’évaluation de cet article par des chercheurs travaillant dans le même domaine et enfin sa publication. Une fois qu’un article est publié, il peut être repris par des médias généralistes (presse, télé, radio) si la découverte est suffisamment retentissante. Il est donc nécessaire de répondre aux questions de journalistes si c’est le cas. Par ailleurs, il est également important de faire connaître cette étude non seulement à la communauté scientifique en participant à des congrès à travers le monde mais également aux populations locales où les découvertes ont eu lieu puisqu’il s’agit de leur patrimoine.

En plus de ces tâches de laboratoire, j’ai également des activités d’enseignement. En effet, je participe à l’enseignement universitaire auprès d’étudiants en Licence et en Master. Cet enseignement porte non seulement sur la paléontologie mais aussi sur des thématiques différentes mais connectées comme l’anatomie, les statistiques, l’imagerie. Il m’arrive également de participer à l’encadrement de stagiaires de 3e en leur présentant la paléoanthropologie.

Des tâches plus administratives (remplir des documents pour partir en mission ou en conférences, répondre à des demandes du public ou d’étudiants…) font également partie de mon travail.

Qu’est-ce qui vous intéresse le plus dans ce métier ?

Mon métier est avant tout une passion et je suis très chanceux de pouvoir faire ce que j’aime. L’étude de notre histoire et de notre évolution est pour moi passionnante car elle est extrêmement riche et nous n’en connaissons qu’une partie.

Un autre aspect très positif est de ne pas rester dans un bureau tous les jours. En effet, certaines de mes activités se font en extérieur sur le terrain. Je voyage également régulièrement vers d’autres pays dans le cadre de conférences ou de collaborations avec des collègues.

Enfin, le dernier aspect qui me plait le plus c’est la diversité de mon métier. J’utilise des compétences très différentes (évolution, statistiques, imagerie) qui me permettent de collaborer avec des personnes qui n’ont pas le même métier (comme des médecins ou des informaticiens). Il y a toujours de nouvelles choses à apprendre.

Depuis quand aimez-vous la science ?

J’ai toujours eu une certaine curiosité scientifique et m’intéresse depuis enfant à la paléontologie. Il y avait toutefois certaines matières scientifiques que je n’appréciais pas particulièrement à l’école comme les mathématiques mais que j’utilise aujourd’hui de façon très fréquente.

Quel est votre plus beau souvenir scientifique ?

Mon plus beau souvenir fut probablement la première fois où j’ai travaillé sur des empreintes de pieds fossiles au début de mon doctorat. Il s’agissait d’empreintes de pieds de Néandertaliens vieilles de 80 000 ans découvertes en Normandie.

À titre plus personnel, l’obtention de mon doctorat fut également un très bon souvenir puisque ma famille et mes amis étaient également présents.

Quel conseil donneriez-vous à des élèves qui veulent devenir scientifiques ?

Mon conseil est de s’accrocher et d’y croire. Les métiers scientifiques sont totalement différents d’autres métiers. Cependant, ils requièrent de longues et difficiles études et tous les candidats de départ ne parviennent pas au bout. Avec de la patience, du sérieux et de la ténacité, c’est possible d’y arriver.