Ils respirent… de l’air !
Il y a différents types de sols qui diffèrent, entre autres, par leur porosité. Si certains sols sont très compacts, comme l’argile, et ne laissent passer ni eau ni gaz (et donc pas d’oxygène pour respirer), d’autres sont plus perméables. Les sols dans lesquels vivent les vers de terre sont suffisamment perméables pour permettre à l’air (et à l’eau) de s’insinuer entre les grains. De plus les vers de terre creusent des galeries en « mangeant » la terre pour se nourrir (ils font le tri de ce qui est comestible dans leur tube digestif avant de rejeter la terre derrière eux). Ils participent donc activement à l’aération et à l’hydratation du sol ce qui en fait des aides précieux pour la bonne santé des sols.
Donc, de l’air circule sur la peau du ver de terre. Mais il n’a ni poumons (comme nous), ni branchies (comme les poissons ou les vers marins). Il respire par la peau ! Sur une grande partie de son corps, elle est extrêmement fine. On appelle cela une respiration cutanée. Cependant il faut que la peau reste humide pour que l’oxygène de l’air se mélange et puisse passer (on dit diffuser) à travers sa peau. Le ver de terre secrète donc du mucus qui le rend visqueux au toucher. Et en plus ça l’aide à glisser dans ses galeries.
Et juste sous la peau il y a de tout petits vaisseaux sanguins, des capillaires, avec du sang bien rouge qui circule. Rouge, car les vers de terre ont de l’hémoglobine dans le sang, presque comme nous. Presque, car ils n’ont pas de globules rouges : leur hémoglobine est une grosse molécule, 50 fois plus grosse que la nôtre, directement en solution dans le sang et capable de capter une centaine de molécules d’oxygène (contre 4 chez nous…) lors de son passage dans les capillaires de la peau.
Le sang des capillaires une fois rechargé en oxygène (et débarrassé du CO2, le dioxyde de carbone, par la même occasion) rejoint le grand vaisseau dorsal du ver de terre où le sang circule vers l’avant. Une demi-douzaine de cœurs latéraux va propulser le sang vers le vaisseau ventral qui va irriguer les organes du ver (muscles, tube digestif…) et leur amener de l’oxygène (et de la nourriture aussi) en faisant circuler le sang vers l’arrière. En sortant des capillaires des organes, le sang, pauvre en oxygène, rejoint le vaisseau dorsal et circule vers l’avant jusqu’à retrouver les capillaires de la peau et se recharger en oxygène. La boucle est bouclée !
La respiration cutanée est sans doute moins efficace que la respiration pulmonaire, mais elle suffit largement à combler les besoins en oxygène du ver de terre qui sont bien moindres que les nôtres. À condition que le ver de terre ne grossisse pas trop car alors la surface de son corps ne suffirait plus à lui fournir assez d’oxygène. Impossible donc de trouver des vers géants dans le sable du désert, ça n’existe pas sur Terre… seulement sur Dune (un film de science-fiction, ndlr) !
Cet article a été publié par The Conversation France – Licence Creative Commons. Auteur(e.s) : François H. Lallier, Professeur de biologie, Station Biologique de Roscoff, Sorbonne Université