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[Interview] Julien Rouyer – Mathématiques

Agrégé de mathématiques et doctorant en informatique, Université de Reims Champagne-Ardenne (URCA)

Quel est votre métier ?

J’enseigne les mathématiques et l’informatique à l’Université de Reims et je fais de la recherche dans ces deux disciplines. Il m’arrive aussi d’enseigner dans d’autres établissements (le Conservatoire national des arts et métiers ou Sciences Po) et de donner des cours particuliers.

A quoi ressemble votre journée de travail ?

Mes journées ne se ressemblent pas toutes.

Souvent, j’enseigne : je suis en classe devant des étudiants et j’essaie de leur transmettre des connaissances. J’ai aussi de nombreuses discussions avec mes collègues et avec les étudiants en dehors des cours, sur des sujets divers (que ce soit à propos de l’organisation des cours et des examens ou bien à propos d’une question mathématique),

Je lis (et j’essaie de comprendre) des articles de recherche en maths et en informatique, je cherche des informations dans des livres ou sur Internet sur des sujets divers.

Parfois je travaille sur la rédaction de manuels universitaires (mon premier vient d’être publié fin août 2022) et d’articles de recherche scientifique. Je dois aussi, comme tout enseignant, rédiger des supports de cours, préparer des sujets d’examen, corriger des copies.

Je cherche souvent à résoudre des exercices : les mathématiques sont un puits sans fond de défis à relever. Cela s’assimile assez souvent à un petit jeu, et ce qui est bien, c’est qu’on peut le faire du fond de son canapé les yeux fermés ou en griffonnant sur un petit bout de papier, assis à son bureau ou en pleine nature, seul ou à plusieurs, et même en faisant autre chose : il suffit, parfois, d’avoir une idée qui traverse l’esprit et cela peut arriver dans n’importe quelle situation.

Qu’est-ce qui vous intéresse le plus dans ce métier ?

Le fait, dans le cadre de mes recherches, d’essayer de comprendre les travaux d’autres scientifiques, récents ou anciens, puis d’étudier des problèmes que personne n’a encore réussi à résoudre, et parfois de réussir à les résoudre. Le fait d’apprendre sans cesse de nouvelles choses.

Dans mes enseignements, l’interaction avec les étudiants est très enrichissante, on s’amuse souvent bien ensemble et j’apprends autant d’eux qu’ils apprennent de moi. Enseigner comporte une grande part de jeu. Résoudre un exercice est un jeu, dans lequel on doit respecter certaines règles et trouver une stratégie pour atteindre le but. Transmettre des connaissances et animer la vie d’une classe est aussi un jeu, proche de celui d’un acteur. C’est un défi sans cesse renouvelé : il faut aimer communiquer, savoir capter l’attention de son auditoire et savoir mobiliser des trésors de pédagogie pour arriver à transmettre les subtilités de certains concepts.

Depuis quand aimez-vous la science ?

Je crois avoir toujours aimé les mathématiques, aussi loin que je me souvienne. J’ai aimé compter au moins dès le CP et bien que savoir très bien compter n’est pas un critère indispensable pour devenir mathématicien, c’est ce qui m’a guidé vers cette activité.

J’ai appris à aimer divers autres pans de la science au fur et à mesure mais ce sont toujours les mathématiques qui m’ont plu le plus.

Quel est votre plus beau souvenir scientifique ?

Le plaisir renouvelé d’arriver à résoudre un problème par soi-même ainsi que la joie d’arriver à reproduire toutes les étapes d’une démonstration ardue, d’en comprendre tous les rouages et les enchaînements. En partant d’une hypothèse et en mobilisant tout un ensemble de connaissances et de techniques, aboutir à un résultat étonnant et peut-être contre-intuitif mais rigoureusement exact procure toujours un plaisir intellectuel intense.

Plus concrètement, savoir qu’un joli petit théorème d’arithmétique datant du XVIIe siècle a permis trois siècles plus tard de développer une méthode pour sécuriser les paiements par carte bancaire, suffit à mes yeux à justifier l’importance majeure des mathématiques dans notre monde.

Quel conseil donneriez-vous à des élèves qui veulent devenir scientifiques ?

Il faut être curieux de tout, lire tout ce qu’on peut, ardemment, vouloir comprendre le fonctionnement des êtres et des choses, de l’univers.

Ne pas avoir peur de se tromper. Comme l’écrivait à peu près Samuel Beckett, il faut essayer, se tromper parfois mais réessayer et se tromper moins. C’est le ressort même de la science, toute son histoire.