Si tu as déjà été voir la mer ou l’océan, tu as peut-être remarqué qu’à chaque fois que tu vois l’eau, elle n’arrive pas tout à fait à la même hauteur sur la plage. C’est ce que l’on appelle les marées : toutes les douze heures et vingt minutes environ, la mer descend jusqu’à marée basse, où l’on voit une plus grande portion de la plage, puis remonte jusqu’à la marée haute… avant de recommencer.
Mais pourquoi ? Et bien, de même que la Terre attire tous les objets vers sa surface et t’empêche, toi (et la mer), de t’envoler, la Lune, elle aussi, essaie de nous attirer. C’est ce que l’on appelle la force de gravité. Mais comme la Lune est plus petite que la Terre et beaucoup plus loin de nous, nous ne sentons pas du tout son attraction sur notre corps. Par contre, quand elle est accumulée sur une quantité d’eau aussi grande que celle de l’océan, alors la force de gravité de la Lune est capable de soulever la surface de l’eau – entre quelques dizaines de centimètres et plusieurs mètres, selon les endroits.
Mais où va l’eau à marée basse ?
Mais d’où vient cette eau, et où va-t-elle ensuite ? Dans certains folklores nordiques, l’eau des océans est aspirée par un énorme trou – un « maelström » – pour être recrachée quelques heures plus tard. Ce n’est pas du tout le cas en réalité. L’eau essaie juste de « suivre la Lune ».
À chaque instant, l’attraction de la Lune fait que l’eau tend à s’accumuler sur le côté de la Terre qui est le plus proche d’elle, c’est-à-dire à l’endroit d’où tu peux voir la Lune au plus haut dans le ciel (ce qui correspondrait au midi solaire pour le soleil). Pour des raisons qui seraient un peu trop longues à expliquer ici, il se trouve que l’eau a tendance à s’accumuler aussi sur la région opposée, qui se trouve le plus loin de la Lune (ce qui correspondrait au minuit solaire pour le soleil). Ce sont les endroits où la marée est haute.
Pour pouvoir fournir cet excédent d’eau dans les zones où la marée est haute, l’océan en prend un peu dans d’autres zones du globe qui se retrouvent donc en marée basse. Et si l’eau ne pouvait pas se déplacer entre ces différents points de la Terre, et bien il n’y aurait pas de marées.
C’est pour cette raison que les lacs ne subissent pas de marées : comme ils ne sont pas directement connectés aux océans, ils ne peuvent pas facilement échanger avec eux de telles quantités d’eau en si peu de temps.
Pour assurer le déplacement de ces masses d’eau colossales des zones de l’océan où la marée descend vers les zones où la marée monte, il se crée des courants océaniques bien connus des marins qui les utilisent pour aller plus vite en bateau. En Europe, le record du courant de marée le plus rapide, qui sévit en face du cap de la Hague en Normandie, est d’environ 22 km/h.
Par contre, comme tu t’en doutes, même avec de tels courants marins, cela prend un peu de temps de faire changer le niveau de l’eau d’un océan entier de quelques mètres. C’est pour cela que la marée haute n’arrive pas exactement quand la Lune est pile au-dessus de nos têtes (ou complètement à l’opposé), mais quelques heures plus tard : environ 3h30 plus tard sur la façade atlantique et jusqu’à 10h plus tard en Haute-Normandie.
Comme la Terre fait un tour sur elle-même en un jour, la Lune passe au-dessus de ta tête une fois par jour, et est suivie par son cortège de marées. D’abord la marée haute quelques heures plus tard après la Lune. Puis une marée basse qui arrive en moyenne 6 heures et 12 minutes après la marée haute. Puis la marée haute opposée à la Lune, encore environ 6 heures et 12 minutes plus tard. Et enfin la dernière marée basse. Oui, tu as bien deviné, elle aussi arrive en moyenne 6 heures et 12 minutes après la dernière marée haute. Ensuite, tout recommence.
Mais pourquoi pas toutes les six heures ? Ça ferait exactement quatre marées par jour, ça serait quand même plus facile à retenir, non ? Et bien tout simplement parce que pendant que la Terre a fait un tour sur elle-même, en 24 heures, la Lune a eu le temps d’avancer un peu sur son propre tour autour de la Terre qui dure environ 27 jours. Chaque jour, il faut donc attendre environ 48 minutes de plus pour que la Lune soit de nouveau à la même position dans le ciel. C’est pour cela que l’heure à laquelle tu vois la Lune dans le ciel se décale un peu d’un jour à l’autre.
De même, nos deux marées hautes et deux marées basses journalières sont retardées d’environ 48 minutes chaque jour, ce qui explique que la durée moyenne entre une marée haute et une marée basse est d’environ 6 heures et 12 minutes. C’est aussi pour cela qu’à chaque fois que tu vas à la plage, la mer est à une hauteur différente, même si tu y vas toujours au même moment de la journée. Donc si tu veux être sûr d’avoir beaucoup de sable mouillé pour faire des châteaux, pense à demander à tes parents de regarder les horaires des marées basses en avance. On les trouve facilement dans le journal, à l’office du tourisme ou sur Internet.
Il n’y a pas que la Lune et les océans qui s’attirent !
Il n’y a pas que les océans qui subissent les marées, la croûte terrestre aussi, même si elle se déforme beaucoup moins, car elle est solide et peut mieux résister. Ainsi toutes les planètes et les lunes du système solaire subissent des marées à la force et aux effets très divers, même si ces objets célestes n’ont pas d’océans. Ce sont les marées, par exemple, qui expliquent pourquoi nous voyons toujours le même côté de la Lune, ou pourquoi Io, une des lunes de Jupiter, est très volcanique. Comment ? Ça, c’est une autre histoire.
Avant de se dire au revoir, savais-tu que, comme l’avait prédit Newton, l’un des premiers scientifiques à avoir expliqué la gravité, « toute force amène une réaction » ? Ainsi, si la Lune est capable de faire bouger les océans, et bien les océans eux aussi sont capables de faire bouger la Lune ! Pas beaucoup, certes, mais à cause d’eux, la Lune s’éloigne de la Terre de presque 4 centimètres par an. Ils sont forts quand même, ces océans !
Cet article a été publié par The Conversation France – Licence Creative Commons. Auteur(e.s) : Jérémy Leconte, Chercheur CNRS au Laboratoire d’Astrophysique de Bordeaux, Université de Bordeaux